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Voici le meilleur ennemi de Nespresso

3 avr

dosettes capsules nespresso 630x420 scalewidth 300 Voici le meilleur ennemi de NespressoPendant onze ans, il a été le patron de Nespresso. Aujourd’hui, Jean-Paul Gaillard ose s’attaquer à la forteresse suisse en lançant ses propres dosettes de café. Un marché sur lequel vient aussi de s’engouffrer le géant Sara Lee. Rude bataille en perspective…

Il pensait avoir une longueur d’avance. Sûr de son fait et visiblement ravi de jouer ce mauvais tour à ses anciens collègues. Jusqu’à mardi dernier, Jean-Paul Gaillard était le meilleur ennemi de Nespresso. Le seul à avoir osé défier la filiale vedette de Nestlé, en se disant prêt à commercialiser des capsules compatibles avec ses machines à café. Et pas tout à fait un inconnu, puisqu’il tenait les rênes de la société entre 1986 et 1997… Mais, aujourd’hui, l’entrepreneur franco-suisse n’est plus le seul à s’attaquer à la forteresse Nespresso. Comme lui, le géant Sara Lee a surpris tout le monde en annonçant il y a trois jours qu’il s’apprêtait à vendre ses propres dosettes, sous la marque L’Or de la Maison du Café. En France, le groupe américain assure qu’il sera possible de s’en procurer dès le 7 avril dans les supermarchés Carrefour, Leclerc et Auchan… Une sérieuse déconvenue pour Jean-Paul Gaillard, qui a, lui, passé un accord d’exclusivité avec Casino, mais n’écoulera ses produits qu’à partir du mois de mai dans les 9.000 points de vente de l’enseigne. Beau joueur, l’intéressé assure se féliciter de l’offensive de Sara Lee. A l’entendre, l’entrée en scène de ce puissant concurrent l’arrangerait presque : c’est lui qui« essuiera les plâtres, ironise-t-il, notamment sur le plan juridique… ».

Sur ce terrain, une belle bataille se profile, en effet. Car on ne s’attaque pas impunément à une citadelle comme Nespresso. Quelque 1.700 brevets protègent les machines et les doses individuelles en aluminium de la société. Et, pour verrouiller un peu plus le système, le roi du café haut de gamme vend uniquement ses capsules via Internet ou dans les 190 boutiques de son réseau de distribution. Depuis un quart de siècle, le modèle a fait ses preuves, le bonheur de Nestlé, et quelques émules. Devenues un standard du marché de l’expresso pas cher, les dosettes en papier Senseo font ainsi le bonheur de Philips, qui commercialise les machines ad hoc. Et, à l’instar de Nespresso, des acteurs comme Lavazza ou Tassimo ont à leur tour développé leurs propres systèmes propriétaires, plus ou moins haut de gamme. Mais, à part quelques tentatives anecdotiques, personne, jusque-là, ne s’était lancé à grande échelle dans la production de dosettes compatibles avec les machines estampillées Nespresso. Des dosettes, qui plus est, vendues dans la grande distribution, à un prix forcément compétitif… Dans son communiqué, Sara Lee évoquait mardi un prix légèrement inférieur à 30 centimes par capsule, contre 33 à 35 centimes pour les capsules Nestlé. Sans que celui des dosettes proposées par Jean-Paul Gaillard soit « totalement finalisé », le patron de la marque Casino, Alain Bizeul, part quant à lui « sur l’idée de vendre 20 % moins cher » que le leader du secteur.

Des dosettes biodégradables

Chez Nespresso, on prend évidemment l’affaire très au sérieux. Patron de la filiale française, Arnaud Deschamps parle même d’un choc « émotionnel », en se désolant que le café qui sortira à l’avenir de ses machines puisse « ne plus être un grand cru Nespresso ». Sans préjuger de la qualité des produits qui seront bientôt commercialisés dans les supermarchés, la nouvelle est forcément rude à avaler pour une entreprise ayant bâti son succès sur l’excellence de ses cafés, et sur une stratégie marketing plongeant le client dans l’univers du luxe, en s’inspirant des codes de l’oenologie et de la cérémonie du thé. S’agissant de Jean-Paul Gaillard, le choc est d’autant plus rude qu’il s’accompagne, de façon plus ou moins avouée, d’un sentiment de trahison…

Pour sa part, l’ancien patron de la maison affiche une sérénité à toute épreuve. La concurrence inattendue de Sara Lee ? « Elle ne change rien à notre plan de développement, soutient Jean-Paul Gaillard. C’est vrai, nous serons en rayons après eux, mais c’est nous qui avons profité du buzz médiatique, en annonçant notre projet les premiers… » A cinquante-cinq ans, le pourfendeur du monopole Nespresso a connu plusieurs vies. Avant même son passage chez Nestlé, il avait montré son flair en matière de marketing en lançant chez Philip Morris le concept de prêt-à-porter masculin Marlboro Classics. Et juste après le lancement de la fusée Nespresso, il n’avait pas hésité à quitter le nid douillet du géant suisse, alors qu’on l’avait propulsé à la tête de la division crèmes glacées. « Je m’y ennuyais », explique-t-il. Quelques aventures plus tard – pas toutes couronnées de succès, comme en témoigne l’échec de la relance du spécialiste de la robe de mariée Pronuptia, dont il quitta la présidence en 2007 -, l’homme se lance aujourd’hui un drôle de défi en s’attaquant à son ancien employeur.

Pour le combat qui s’annonce, Jean-Paul Gaillard s’estime muni de quatre atouts : il se dit compétent en droit, ce qui est effectivement une bonne nouvelle… L’homme a beau assurer avoir trouvé une « faille »lui permettant de contourner l’un des brevets de Nespresso, il lui faudra sans doute batailler ferme sur le sujet, car, en principe, le brevet en question ne tombera dans le domaine public qu’en 2012… Autre « plus » : l’entrepreneur se définit comme bon hydromécanicien (« à quatorze ans, je démontais et remontais le moteur de la voiture de mon père »), une qualité précieuse dans cet univers du café où une part importante de la qualité de l’espresso dépend de la pression de la vapeur d’eau qui traverse la capsule. Jean-Paul Gaillard surfe par ailleurs sur la vague de l’environnement, en promettant une dosette à base d’amidon de maïs, donc biodégradable, alors que Nespresso, souvent critiqué par les écologistes pour son choix de l’aluminium, est engagé dans un très lourd programme de recyclage des capsules usagées. Enfin, à l’instar d’une compagnie aérienne low cost, il propose un modèle économique radicalement différent. Boutiques situées sur les meilleurs emplacements, énorme budget publicitaire avec l’acteur George Clooney en premier ambassadeur de la marque, livraisons à domicile nécessitant une logistique pointue… « Le schéma que j’avais mis sur pied chez Nespresso et que mes successeurs ont développé est un modèle très puissant, mais qui coûte très cher », constate-t-il. A l’inverse, « grâce à la vente en marque de distributeur, nous sommes très peu gourmands en frais généraux. Nous pouvons donc être moins chers tout en offrant du très bon café. »

Pour l’heure, ces arguments laissent le camp d’en face dubitatif. Dans quelle faille espère donc s’immiscer Jean-Paul Gaillard, qui reste mystérieux, se contentant d’indiquer que sa capsule s’ouvre sous la pression de l’eau alors qu’une dosette Nespresso est perforée par des pointes ? Arnaud Deschamps l’attend l’arme au pied : « Tant que nous n’aurons pas vu ses produits, nous ne pouvons pas lancer une action en propriété industrielle », lâche le patron de Nespresso France. Mais il ne fait guère de doute que ses avocats seront parmi les premiers clients à se ruer sur les linéaires de Casino, en mai. La capsule biodégradable, plus écologique que l’aluminium ? « Le bilan carbone d’une tasse d’un café Nespresso est de 82 grammes de CO2, lavage de la tasse non compris. Et nous nous sommes engagés à tomber à 66 grammes à l’horizon 2013 », poursuit-il, curieux de connaître le bilan carbone de ses futurs challengers.

Quant à la vente des capsules en grande distribution, Arnaud Deschamps ne nie pas l’intérêt du concept pour un concurrent, mais le récuse pour Nespresso. « Nous n’avons pas fait le choix des hypermarchés, mais celui de la relation humaine pour des clients qui achètent bien plus que la promesse d’un café d’exception. Et ce choix du modèle humain, nous allons encore le renforcer »…

Sara Lee, un redoutable rival

Dans la forteresse assiégée, on s’interroge enfin sur la puissance de feu déployée par Jean-Paul Gaillard. En bon stratège, ce dernier cache en effet son jeu avant l’assaut. De combien, par exemple, dispose Ethical Coffee Company, la société qu’il a créée en Suisse ? Réponse : « 20 millions d’euros de capital-développement, mais s’il en faut 40, on les aura ! » Qui sont ses partenaires au capital ? « Unigrains, l’artiste-animateur Arthur, une structure de la famille Benetton », mais aussi… « d’autres investisseurs que je ne peux pas citer ». Combien de capsules Casino et d’autres lui ont-ils déjà commandés ?« 2,5 milliards », affirme-t-il publiquement le 8 mars, soit, déjà, pas loin de la moitié des dosettes écoulées par Nespresso en un an. Mais, les jours suivants, ce chiffre passe à 3,5 milliards, puis à 4 milliards d’unités. « Le carnet de commandes gonfle tous les jours », sourit-il… Quant à l’outil industriel (les capsules seront fabriquées par Vegeplast, une PME des Hautes-Pyrénées, puis conditionnées par Folliet, un torréfacteur de café de Chambéry), il progresse au même rythme, Jean-Paul Gaillard évoquant déjà des études pour ériger une deuxième usine (peut-être à Fribourg en Suisse, en plein territoire de Nestlé…) alors que la production démarre à peine dans la première. Mais tout ceci, c’était avant que la Maison du Café entre en scène… Face à ce redoutable rival, quelle part de marché peut réellement viser Jean-Paul Gaillard ? Pour Alain Bizeul, chez Casino, l’enjeu n’est pas là : « Nous voulons simplement libérer ce marché, afin de l’étendre encore plus. Nous sommes convaincus qu’il y a de la place pour tout le monde. » On s’est dit exactement la même chose chez Sara Lee et, soudain, le terrain de jeu paraît beaucoup plus petit…

CLAUDE BARJONET, Les Echos

Les chiffres clefs de Nespresso

Créée en 1986, la filiale de Nestlé a réalisé l’an dernier un chiffre d’affaires de 2,77 milliards de francs suisses (près de 2 milliards d’euros) avec 6,5 millions de clients dans plus de 50 pays. Disposant d’une capacité de production annuelle de 9 milliards de capsules, Nespresso les vend par Internet et dans un réseau exclusif de 190 boutiques à la décoration luxueuse.
Fabriquées par quelques industriels licenciés, ses machines à café sont, en revanche, également disponibles dans la grande distribution. L’entreprise a connu une croissance annuelle moyenne de 30 % depuis 2000. Ses profits ? Ils sont noyés, dans le rapport annuel du géant suisse, au sein de la division « Autres activités alimentation et boissons »…



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